Étude de cas : Le Canada devrait-il favoriser la privatisation des soins de santé dans ses provinces et territoires?

Leçon connexe
Leçon C : Discussion constructive
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Énoncé de discussion
Le Canada devrait favoriser la privatisation des soins de santé dans ses provinces et territoires.
Cet exercice a été mis à jour le 02/05/2025.
Contexte
Au Canada, la responsabilité des services de santé est partagée entre les provinces et territoires et le gouvernement fédéral, ce qui explique l’existence de 13 régimes d’assurance maladie distincts.
Au cours des dernières années, les systèmes de santé partout au pays ont connu une augmentation marquée du temps d’attente pour accéder aux services médicaux, tant aux urgences que pour des procédures médicales nécessaires. Cette fâcheuse situation a parfois eu des conséquences tragiques. En novembre 2023, par exemple, un patient est décédé aux urgences de Winnipeg après avoir attendu un lit pendant plus de 33 heures. À peine un mois plus tard, au Québec, deux patients sont décédés alors qu’ils attendaient dans une salle d’urgence qui fonctionnait au double de sa capacité depuis des semaines. En 2025, la situation reste critique : plusieurs décès évitables ont encore été recensés dans les services d’urgence, notamment à Winnipeg et à Montréal. Cette crise persistante a entraîné une forte pression sur le personnel médical, l’obligeant à travailler de plus longues heures. En conséquence, l’épuisement professionnel s’est accentué chez les employés et certains ont même choisi de quitter la profession.
Bien que la grande majorité des médecins au Canada travaillent dans le réseau public, ils ont, sauf en Ontario, la possibilité d’exercer au privé. En quittant le réseau public, les médecins peuvent facturer directement à leurs patients l’intégralité de leurs services. Toutefois, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont adopté des lois pour encadrer et limiter la pratique privée. C’est au Québec qu’on compte le plus grand nombre de médecins en cliniques privées.
Certains voient le développement du privé comme une solution pour réduire les délais d’attente et retenir le personnel, tandis que d’autres craignent qu’il ne fragilise le système public et coûte plus cher aux contribuables.
Pour en savoir plus
- Association Médicale Canadienne | Comprendre les soins de santé privés et publics au Canada
- Coalition canadienne de la santé | Patient décédé après 16 heures aux urgences
Le savais-tu?
En 1947, après avoir bénéficié de soins médicaux gratuits qui lui ont sauvé la vie durant son enfance, Tommy Douglas, premier ministre de la Saskatchewan, met sur pied le premier programme d’assurance hospitalisation financé par le gouvernement en Amérique du Nord. Quelques années plus tard, inspiré par cet exemple, le gouvernement fédéral lance à son tour un plan national pour financer les soins médicaux des Canadiens et des Canadiennes. Ce plan est mis en œuvre en partenariat avec les provinces et territoires, qui sont responsables de la gestion, de l’organisation et de la prestation des services de santé auprès de leur population. Depuis, le Canada garantit à tous ses citoyens et citoyennes un accès gratuit aux soins hospitaliers et médicaux nécessaires. |
En accord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient être d’avis que le Canada devrait favoriser la privatisation des soins de santé dans ses provinces et territoires.
Un meilleur accès aux soins
La population canadienne a plus de difficulté que jamais à accéder aux soins de santé dont elle a besoin. Les délais ne font pas qu’engendrer du stress chez les patients et leurs proches, mais ils peuvent aussi mener à des décès qui auraient pu être évités. En favorisant la privatisation des soins de santé, davantage d’options seraient offertes aux citoyens, de sorte qu’ils auraient plus de chance d’être traités dans un délai raisonnable.
Des frais qui ne sont pas nécessairement plus élevés
Les soins de santé privés ne signifient pas nécessairement une augmentation des coûts pour les particuliers. Déjà, les gouvernements provinciaux et territoriaux paient, par l’intermédiaire du système d’assurance-maladie, des cliniques privées pour offrir gratuitement des chirurgies et d’autres services aux citoyens. Ce modèle, appelé « prestation privée de soins publics », repose sur l’idée que les soins demeurent gratuits pour les patients, tout en permettant un accès plus rapide et sans coûts additionnels pour les contribuables.
Une charge de travail diminuée
Depuis des années, le personnel de la santé au Canada est surchargé, une situation que la pandémie de COVID-19 n’a fait qu’aggraver. De nombreux médecins et infirmières ont déserté le réseau public pour le secteur privé ou ont changé complètement de carrière. Bien que l’embauche de nouveau personnel soit la solution à long terme, à court terme, les gouvernements pourraient devoir recourir davantage au secteur privé pour alléger la pression sur les établissements publics. Par ailleurs, les meilleures conditions de travail offertes dans le secteur privé favorisent la rétention du personnel, ralentissant ainsi l’exode de la profession qui accentue la surcharge du réseau public.
Une rétention des cliniques dans les milieux ruraux et isolés
Les régions rurales sont particulièrement touchées par les difficultés d’accès aux soins de santé, où les options de soins offertes aux résidents se font peu nombreuses. Plusieurs cliniques et hôpitaux peinent à recruter du personnel pour remplacer les départs, ce qui entraîne parfois la fermeture de certains établissements. En simplifiant les démarches permettant aux cliniques de se retirer du système public, il serait possible de les maintenir ouvertes et de continuer à offrir des services essentiels aux habitants, en particulier dans les régions les plus isolées du pays.
Pour en savoir plus
En désaccord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient être d’avis que le Canada ne devrait pas favoriser la privatisation des soins de santé dans ses provinces et territoires.
Une accentuation de la pénurie d’employés
L’épuisement professionnel est l’une des principales raisons évoquées par ceux qui quittent le réseau public. Attirés par de meilleures conditions de travail et un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, de nombreux médecins, infirmières et employés du réseau public quittent leur poste pour rejoindre le secteur privé. Chaque départ vers le privé dégarnit davantage le réseau public et faire appel aux entreprises privées pour aider les hôpitaux risque d’aggraver le problème en créant plus d’emplois dans le réseau privé et en accélérant la perte de travailleurs du réseau public.
Une efficacité qui n’a pas été démontrée
Des études menées au Royaume-Uni, où coexistent un système de santé public similaire à celui du Canada et plus d’une centaine d’hôpitaux privés, révèlent que les établissements privés, motivés par le profit, sont liés à des taux plus élevés de décès évitables et qu’il n’existe aucune preuve qu’ils contribuent à réduire les temps d’attente à long terme. Par ailleurs, la recherche scientifique montre que la privatisation des soins de santé, notamment des procédures chirurgicales, n’améliore pas l’accès aux services. D’ailleurs, au Canada, les provinces où le secteur privé est le plus présent, soit l’Alberta, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan et le Québec, affichent les temps d’attente les plus longs.
Des coûts exorbitants
Les établissements de soins de santé privés fixent librement leurs tarifs, et les procédures qu’ils offrent coûtent souvent plus du double de celles réalisées dans le réseau public. En confiant des chirurgies au privé pour désengorger le système, les gouvernements provinciaux et territoriaux risquent d’alourdir considérablement la facture, ce qui entraînerait, en fin de compte, des coûts plus élevés pour les contribuables ou une baisse de services dans d’autres secteurs.
Un système à deux vitesse
La privatisation du système de santé alimente un cercle vicieux. Les provinces et territoires, en versant l’argent des contribuables à des entreprises privées, paient leurs soins de santé à prix fort tout en contribuant à l’érosion du réseau public. Attiré par de meilleures conditions de travail, le personnel migre vers le privé, alourdissant la charge de ceux qui restent. L’engorgement du système pousse alors encore davantage les gouvernements à se tourner vers le secteur privé, et ainsi de suite. Si cette dynamique se poursuit, elle pourrait mener à un système de santé à deux vitesses : un accès rapide et de qualité pour les plus riches, et un réseau public affaibli pour tous les autres.
Pour en savoir plus
- Le Devoir | Que disent les études de la privatisation de la santé? [Attention, il s’agit d’un texte d’opinion]
- La Presse | Le public, le privé et le bénévolat à 500 000 $
- Radio-Canada | L’Alberta accélère la cadence de privatisation des opérations chirurgicales
- Rad | Pour ou contre le privé en santé? Avec la médecin Michelle Houde (La MD colorée)