Étude de cas : Faut-il renommer les espaces publics à l’héritage controversé?

Leçon connexe
Leçon C : Discussion constructive
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Le gouvernement devrait renommer les espaces publics qui commémorent des personnages historiques controversés.
Cet exercice a été mis à jour le 12/12/2024.
Contexte
L’histoire du Canada est indissociable du colonialisme. Cela est largement dû au traitement réservé aux peuples autochtones, qui habitaient le territoire bien avant l’arrivée des premiers colons européens.
Comme ailleurs dans le monde, le Canada a voulu commémorer des personnages qui ont marqué l’histoire du pays en édifiant des statues en leur honneur, ou en donnant leur nom à des rues ou des édifices. Cependant, plusieurs de ces personnages historiques ont joué un rôle actif dans le projet de colonisation et laissent un héritage controversé.
Par exemple, de nombreuses voix se sont élevées pour demander à ce que les espaces publics portant le nom de Sir A. MacDonald soient renommés. À Montréal, une statue de MacDonald avait été déboulonnée lors d’une manifestation et la ville avait pris la décision de ne pas la réinstaller. MacDonald, le 1er premier ministre du Canada, a contribué à la mise en place du système des pensionnats autochtones, dans lequel les enfants étaient arraché.e.s à leurs familles pour être assimilé.e.s à la culture canadienne, bien souvent en subissant des abus et des traitements violents.
Plusieurs villes à travers le pays sont confrontées à des décisions de ce type. Faut-il conserver les hommages rendus à des personnages historiques, même s’ils sont aujourd’hui considérés comme racistes? Ou faut-il renommer ces espaces publics au nom de la réconciliation avec les peuples autochtones?
Les personnes qui souhaitent renommer ces espaces estiment qu’il faut reconnaître le tort causé par ces figures historiques. Retirer leurs noms de l’espace public est considéré comme un pas vers la réconciliation avec les peuples autochtones et la guérison. Les personnes qui s’y opposent croient plutôt qu’effacer ces noms de l’espace public revient à effacer une partie de l’histoire du Canada et les contributions de ces personnages. Selon elles, il est important de comprendre en quoi le contexte dans lequel ces personnages ont vécu est différent de celui d’aujourd’hui.
Pour en savoir plus
- Les As de l’Info | Qui en veut à la reine?
- MÀJ | Pourquoi avoir déboulonné la statue de John A. MacDonald?
- Francopresse | Le grand dérangement des noms
- Radio-Canada | Déboulonner ou non nos statues, un faux dilemme?
- Radio-Canada | Dundas, Ryerson, Macdonald : qui étaient-ils et pourquoi sont-ils controversés?
En accord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient être en accord avec le fait de renommer les espaces publics qui commémorent des personnages historiques controversés.
Reconnaître les torts causés
Donner à des lieux publics le nom de personnes associées au colonialisme, à l’impérialisme et au racisme, peut être considéré comme une façon de glorifier leurs actions et de légitimer leur héritage. Renommer ces lieux peut être perçu comme une façon de reconnaître les torts causés.
Refléter l’évolution des valeurs de la société
Supprimer les noms de personnages historiques coloniaux controversés de l’espace public peut être un moyen de rejeter les normes du passé et de mettre de l’avant l’évolution des valeurs de la société, telles que l’équité et la justice sociale.
Favoriser la réconciliation avec les peuples autochtones
Retirer des espaces publics les noms de ceux qui ont systématiquement opprimé les peuples autochtones au cours de l’histoire peut être considéré comme un geste de réconciliation et une étape vers l’établissement de meilleures relations avec les peuples autochtones.
Soutenir la culture autochtone
Les espaces publics sont parfois renommés pour refléter l’héritage autochtone, ce qui peut être vu comme une façon de retirer les rappels liés au colonialisme dans la vie de tous les jours et de soutenir la culture autochtone dans les espaces publics. En 2022 par exemple, l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard a voté à l’unanimité pour renommer le pont de la Confédération « traversée Epekwitk ». « Epekwitk » est le nom donné au territoire par les communautés mi’kmaq de la région et il signifie « ce qui se couche sur l’eau »*.
Encourager la discussion et l’engagement civique
Renommer des espaces publics peut encourager le discours public et susciter des discussions sur l’héritage du colonialisme. Cela peut également être un moyen de faire pression sur les dirigeant.e.s politiques et les institutions afin que des mesures concrètes soient adoptées pour lutter contre le racisme systémique.
Pour en savoir plus
- Radio-Canada | Renommer la rue Dundas : Qui suivra l’exemple de Toronto?
- Radio-Canada | Le débat sur la rue Dundas permet de réexaminer le passé, pense Émilie Nicolas
- Radio-Canada | Statues controversées : il faut « corriger le tir » de l’histoire, croit un sociologue
* Le pont de la Confédération est régi par le gouvernement fédéral, c’est donc à lui que revient la décision de le renommer ou non. La demande faite par les député.e.s de l’Île-du-Prince-Édouard en 2022 n’avait pas encore été tranchée par Ottawa en 2024.
En désaccord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient s’opposer à l’idée de renommer les espaces publics qui représentent des figures historiques controversées.
Effacer l’histoire du Canada
Retirer le nom de personnages ayant contribué à l’histoire du Canada supprime un lien important avec le passé. Pour certaines personnes, effacer l’histoire, qu’elle soit positive ou négative, constitue un danger : il faut se souvenir du passé pour éviter de le reproduire.
Ignorer des contributions historiques
Évaluer les personnages historiques à travers le prisme des valeurs modernes est injuste et amoindrit leurs accomplissements et leurs contributions à la société. Pour certaines personnes, il est important de replacer leurs actions dans le contexte historique et les valeurs de l’époque. Par exemple, Egerton Ryerson, dont le nom à été retiré d’une université de Toronto en 2022 (aujourd’hui, l’Université métropolitaine de Toronto), a consacré sa carrière au développement de l’éducation. Certaines personnes estiment que retirer son nom sous prétexte qu’il a également joué un rôle dans la création des pensionnats autochtones est une distorsion de l’histoire.
Des dépenses considérables
Renommer des espaces publics peut engendrer des coûts considérables et peut exiger que soient modifiés la signalisation, les cartes et d’autres documents. En 2021, le conseil municipal de la ville de Toronto a voté en faveur du changement de nom de la rue Dundas. D’abord estimé à 6,3 millions de dollars, les coûts ont été réévalués à 12,7 millions en 2023. La mise en œuvre du changement de nom devrait se poursuivre jusqu’en 2025.
Des divisions sociétales
Changer le nom d’un espace public peut diviser l’opinion publique inutilement et détourner l’attention de questions plus urgentes. Il se peut qu’il n’y ait pas de consensus sur les noms à choisir pour remplacer les noms coloniaux, ce qui peut entraîner de nouvelles divisions.
Une pente glissante
Comment fixer la limite entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas? Renommer les espaces publics pourrait conduire à un cycle sans fin, où les noms doivent être changés à mesure que les valeurs et les normes sociétales continuent d’évoluer.
Pour en savoir plus
- Radio-Canada | Une historienne appelle à la prudence avant de retirer des monuments de personnages historiques controversés
- ONFR | L’Université de Moncton ne changera pas de nom
- Radio-Canada | Un ex-maire catégorique : renommer la rue Dundas se ferait à un « coût extraordinaire »
- Radio-Canada | Un groupe veut un plébiscite sur le changement de nom du pont de la Confédération