Étude de cas : Le Canada devrait-il limiter le nombre d’heures que peuvent travailler les jeunes de moins de 16 ans?

Leçon connexe
Leçon C : Discussion constructive
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Le Canada devrait limiter le nombre d’heures que peuvent travailler les jeunes de moins de 16 ans.
Cet exercice a été mis à jour le 27/05/2025.
Contexte
Depuis quelques années, le Canada traverse un contexte économique difficile. Les employeurs peinent à recruter de la main-d’œuvre et, faute de personnel, certains sont contraints de réduire leurs heures d’ouverture ou même de fermer complètement leurs portes. Les jeunes sont apparus comme solution de rechange à ce problème, bien qu’ils soient aujourd’hui les premiers à voir leurs heures réduites ou leurs emplois coupés.
Il n’en reste pas moins rare de voir de jeunes Canadiennes et Canadiens travailler, parfois dès l’âge de 11 ou 12 ans. Mais cela n’est pas sans conséquence. Le nombre de blessures au travail chez les mineurs a explosé au cours de la dernière décennie.
En 2022, un préposé aux opérations extérieures dans un camping près de Québec âgé de moins de 14 ans a été grièvement blessé dans un accident impliquant un véhicule tout-terrain. En 2021, un jeune de 16 ans a perdu l’usage de son œil droit à la suite d’un accident de travail à Verdun. En 2020, un jeune employé qui travaillait dans une industrie en Chaudière-Appalaches est décédé après une mauvaise manœuvre avec un chariot élévateur. Il avait 14 ans.
Ces tragédies ont un point en commun : le non-respect des règles de sécurité, tant de la part des employeurs que des jeunes eux-mêmes. Elles soulèvent aussi des questions quant à la présence des mineurs sur le marché du travail. Est-ce que le Canada devrait encadrer davantage l’emploi chez les jeunes?
Les lois actuelles encadrant l’occupation d’un emploi par des mineurs varient d’une province ou d’un territoire à l’autre. Ce sont les gouvernements provinciaux et territoriaux qui légifèrent en la matière. Dans la plupart des cas, l’âge minimal pour occuper un emploi rémunéré est fixé à 14 ans et des restrictions s’appliquent quant au type d’emploi et au nombre d’heures autorisées. Toutefois, aucune norme nationale ne vient uniformiser ces règles à l’échelle du pays.
Les opinions concernant la présence des jeunes sur le marché du travail sont assez partagées. Les personnes en faveur soutiennent qu’occuper un emploi dès un jeune âge est une expérience formatrice et enrichissante et que cela assure une autonomie financière à ces personnes mineures tout en contribuant à atténuer la pénurie de main-d’œuvre. À l’inverse, celles qui réclament un encadrement plus strict dénoncent les dangers physiques et psychologiques, le risque de décrochage scolaire et les risques d’exploitation des jeunes qui travaillent.
Pour en savoir plus
- Radio-Canada | Emploi : embauchée à 12 ans et heureuse de travailler
- Radio-Canada | Autoriser les jeunes de 13 ans à travailler pour contrer la pénurie de main-d’œuvre?
- Radio-Canada | Pénurie de main-d’œuvre oblige, des enfants de 11 ans sont déjà au travail au Québec
- Réseau Réussite Montréal | La conciliation études-travail.
- La Presse | Le travail des jeunes inquiète les Québécois
- Le Devoir | Réglementer le travail des enfants
- Employeurs engagés | Bénéfices et inconvénients du travail durant les études
Le savais-tu?
C’est la Colombie-Britannique qui applique la réglementation la plus stricte au pays. Depuis 2021, l’âge minimum pour occuper un emploi rémunéré y est fixé à 16 ans. Dans la majorité des autres provinces, les jeunes de moins de 16 ans peuvent travailler, mais certaines conditions s’appliquent. L’une des plus courantes est l’obligation d’obtenir une autorisation parentale. Cette exigence varie généralement entre 13 et 16 ans, selon la province. Un consensus se dégage néanmoins à travers le pays : les jeunes ne peuvent pas travailler durant les heures de classe. En règle générale, les lois provinciales prévoient plusieurs exceptions selon le type d’emploi. Des tâches comme le gardiennage, l’aide aux devoirs ou la distribution de journaux sont souvent accessibles aux enfants dès l’âge de 12 ans, voire plus tôt dans certains cas. À l’inverse, les emplois en milieu industriel ou sur les chantiers de construction sont strictement réservés aux plus âgés, en raison des risques qu’ils comportent. Informe-toi sur les règles et exceptions propres à ta province ou ton territoire en consultant le site de ton gouvernement provincial ou territorial. |
Coup d’œil international
En avril 2025, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, a donné son appui à un projet de loi visant à modifier la législation sur le travail des enfants afin de pallier la pénurie de main-d’oeuvre dans cet état américain. Parmi les assouplissements prévus par le projet de loi, on retrouve la possibilité pour les jeunes de 14 et 15 ans de travailler sans limite d’heures ni obligation de pauses, l’autorisation de faire travailler les personnes de 16 et 17 ans plus de six jours consécutifs, ainsi que la suppression de toutes les restrictions concernant les horaires et la durée du travail des 16-17 ans. Certains s’inquiètent pour les droits des enfants et d’autres y voient une solution à la pénurie de main-d’œuvre. |
En accord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient être d’avis qu’il faudrait encourager davantage le travail chez les adolescents et adolescentes du secondaire.
Une expérience formatrice et enrichissante
Le travail pendant les années de secondaire permet aux jeunes d’acquérir des compétences précieuses, comme le sens des responsabilités, la gestion du temps, la collaboration et la résolution de problèmes. Ces expériences concrètes les préparent à la vie adulte, les valorisent et favorisent leur développement personnel, en plus de les aider à mieux comprendre leurs intérêts professionnels. Travailler permet également de socialiser autrement et de s’épanouir dans un autre contexte que celui de l’école ou de la famille. De nombreux parents et enfants ajoutent que le travail constitue une alternative constructive au temps passé à jouer à des jeux vidéos ou à surfer sur les réseaux sociaux. Des études ont même démontré que, de façon générale, les jeunes avec un travail de moins de 15 heures réussiraient mieux à l’école : ils auraient de meilleurs résultats scolaires et décrocheraient moins que les jeunes qui ne travaillent pas.
Une autonomie financière
En occupant un emploi, les jeunes peuvent gagner leur propre argent, ce qui leur permet d’assumer certaines dépenses personnelles, comme les sorties, les vêtements ou les fournitures scolaires. Cela leur enseigne aussi la valeur de l’argent et les bases de la gestion budgétaire, renforçant leur indépendance et leur sentiment de fierté. De plus, avec l’augmentation du coût de la vie, certains pensent au long terme et travaillent déjà pour épargner.
Une solution à la pénurie de main-d’oeuvre
Dans plusieurs secteurs, comme la restauration, le commerce de détail ou les services, les employeurs peinent à recruter suffisamment de personnel. Les conditions dans ces secteurs, comme le travail de soir et de fin de semaine ou les emplois saisonniers, peuvent complexifier la tâche des employeurs. Contrairement aux adultes, qui recherchent généralement des postes plus stables, les jeunes sont souvent ouverts à des emplois temporaires, ce qui en fait une ressource précieuse pour ces secteurs. Encourager l’emploi chez les jeunes du secondaire peut contribuer à atténuer cette pénurie, tout en leur offrant une première expérience professionnelle utile et valorisante. Les emplois saisonniers, comme ceux dans les cantines ou les crèmeries ou à la cueillette dans les champs, reposent largement sur les moins de 14 ans, car ils sont disponibles, flexibles et motivés. Interdire aux personnes mineures de travailler pourrait affecter durement les petites entreprises canadiennes et les forcer à fermer leurs portes.
Pour en savoir plus
- Radio-Canada | Emploi : embauchée à 12 ans et heureuse de travailler
- Le Journal de Québec | «Ça forge le caractère»: un jeune de 13 ans «grandit» grâce à son emploi
- Le Journal de Québec | Embauché en quelques minutes à 13 ans: il impressionne déjà son patron et gravit les échelons
- Radio-Canada | Travail des enfants : une ouverture pour les producteurs agricoles québécois
- Le Manic | “Nos 14 ans nous ont sauvés cette année”
- Radio-Canada | Moins d’heures de travail pour les jeunes de 14 à 16 ans dès vendredi au Québec
Le savais-tu?
Depuis 2024, la situation a grandement changé. Alors qu’à peine quelques années auparavant les employeurs manquaient de main-d’œuvre et se tournaient vers les jeunes, les jeunes d’aujourd’hui font face à une crise de l’emploi. |
En désaccord
Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles certaines personnes pourraient être d’avis qu’il ne faudrait pas encourager davantage le travail chez les adolescents et adolescentes du secondaire.
Des dangers physiques et psychologiques
Dans les dernières années, le nombre d’accidents de travail chez les jeunes, une population particulièrement vulnérable, a connu une hausse préoccupante. En raison de leur grande mobilité sur le marché du travail, les jeunes changent fréquemment de milieu de travail et sont ainsi exposés à de nouveaux environnements ainsi qu’à des instruments ou à des tâches inadaptés à leur âge, le plus souvent sans formation adéquate ni supervision appropriée. D’ailleurs, dans la majorité des accidents impliquant de jeunes travailleuses et travailleurs, on relève des lacunes en matière de prévention, de formation et de respect des normes de sécurité de la part de certains employeurs. Par ailleurs, le travail peut aussi entraîner des impacts psychologiques chez les jeunes : anxiété, pression de performance, fatigue excessive et troubles du sommeil ou perte de motivation scolaire dues à des attentes élevées ou à des conditions de travail stressantes et difficiles. À un âge où l’équilibre personnel est encore en développement, ces défis peuvent compromettre le bien-être global des jeunes. Dans les cas les plus graves, les conséquences physiques et psychologiques peuvent avoir des répercussions durables sur leur avenir.
Une augmentation du décrochage scolaire
Les jeunes en emploi doivent souvent travailler le soir ou la nuit, rester debout pendant de longues heures, assumer d’importantes responsabilités, faire face à une charge de travail élevée ou à un rythme soutenu et affronter des situations tendues avec des clients ou des collègues. Ces conditions de travail peuvent nuire à leur santé et à leurs études. En règle générale, l’absentéisme, l’échec scolaire, le redoublement et le décrochage scolaire augmentent en fonction du nombre d’heures travaillées. Les recherches montrent que c’est surtout le nombre d’heures travaillées qui pose problème. Pour d’autres jeunes en emploi, c’est plutôt l’appât du gain qui les expose au décrochage scolaire. Comme le marché du travail offre souvent des salaires intéressants sans formation requise, certains peuvent être tentés d’abandonner les bancs d’école. À long terme, cette situation pourrait engendrer une pénurie de main-d’œuvre qualifiée.
Un risque d’exploitation
En raison de leur jeune âge et de leur manque d’expérience, il est souvent difficile pour les jeunes de faire respecter leurs droits ou de poser des limites claires à leur employeur. Plusieurs rapportent qu’ils se sentent obligés d’accepter des quarts de travail supplémentaires, même lorsqu’ils sont épuisés ou que cela nuit à leurs études, par peur de représailles ou de décevoir. On ne peut pas s’attendre à ce que des jeunes en pleine construction identitaire assument seuls la responsabilité de leur bien-être en milieu de travail.
Pour en savoir plus
- Le Journal de Québec | Le travail des jeunes pourrait nuire à leur réussite scolaire
- Première lecture | Le travail des jeunes au Québec
- Radio-Canada | 10 heures de travail maximum par semaine ouvrable pour les jeunes de 14 à 16 ans
- ÉCOBES | La conciliation études-travail chez les élèves francophones montréalais de 4e et de 5e années du secondaire